Paver ses chaussées et ses routes, n’est-ce pas l’apanage de toute cité civilisée ? Ainsi, Phéniciens, Carthaginois, Romains avaient-ils déjà recours au dallage ou à l’empierrement…
Un peu d’histoire:
Actrices incontournables de l’aménagement de voiries et d’espaces publics sur l’ensemble des projets qualitatifs, les entreprises de pavage se sont fédérées pour servir leur spécialité, bien décidées à tirer un trait sur une période qui n’a que très peu favorisé leur épanouissement. Période enfin révolue où le pavage se conjuguait uniquement au m2 et où les paveurs recevaient l’appellation si péjorative de « tâcherons ».
Les professionnels du pavage ont pris conscience que la résurrection de leur spécialité passait par la reconquête de la passion pour ce métier prestigieux qui sublime nos espaces publics et enrichit notre patrimoine.
En se fédérant, ces professionnels ne vivent plus leur passion individuellement, ils la partagent désormais avec une réelle émulation autour d’un projet collectif gratifiant et salvateur pour l’avenir de leur spécialité.
Ils mesurent cependant le long chemin qu’ils devront parcourir, la force de travail, la rigueur et l’abnégation dont ils devront faire preuve, pour que leur belle spécialité retrouve son juste rang, ainsi que tout le prestige qui fut le sien à travers les siècles derniers.
Ces spécialistes ambitionnent de réorganiser la filière dans leur région, former les paveurs de demain, exercer leur devoir de conseil et partager leur expertise technique et leur savoir-faire. Ils l’envisagent avec toute l’humilité relative à leur statut de PME et avec les moyens dont ils disposeront. Ils ne souhaitent en aucun cas brûler les étapes, ni révolutionner la profession au risque de perdre l’âme des entreprises spécialisées qui, durant ces 30 dernières années, ont su malgré tout résister et s’adapter, parfois même sur 2 générations, à un marché en perpétuelle évolution.
Conscientes que le marché exige des compétences mais aussi de la compétitivité, les entreprises resteront attachées à la culture de la performance et du rendement. Deux notions inscrites depuis toujours dans l’ADN du paveur. Mais le métier doit avant tout s’exercer dans le strict respect des bonnes pratiques et des règles de l’art.
Dans cette dynamique de moralisation, de professionnalisation et d’émancipation, les entreprises de pavage projettent de bâtir ensemble l’avenir de la spécialité, le pavage de demain… Armés d’une volonté affirmée et d’une conscience professionnelle à la hauteur de l’enjeu, ces spécialistes sortent définitivement de l’ombre, bien décidés à prendre leur destin en main. Comme l’ont fait avant eux, et avec succès, de nombreuses spécialités de la branche. Sous couvert et avec le soutien des instances professionnelles.
Gageons que l’APP parvienne à maintenir le cap qui permettra à ces professionnels de la pose de promouvoir avec succès leur spécialité, d’encadrer au mieux leur métier, de former et de transmettre. Et à inspirer les professionnels du pavage établis dans les autres régions en les incitant à se fédérer eux-mêmes, ou à rejoindre l’APP qui accueillera chaleureusement toutes les entreprises qui partagent l’envie et le besoin de voir leur spécialité grandir. Et qui sait? Parvenir un jour à ne former qu’une seule organisation professionnelle représentative sur l’ensemble du territoire, ou un syndicat national de spécialité avec ses représentations régionales. Cette jeune association a gagné une première bataille : celle d’avoir réussi à fédérer, dans un esprit de confraternité remarquable et avec une ferveur partagée, les 10 entreprises spécialisées leaders en Ile de France.
Les paveurs sont responsables, solidaires, consciencieux et ambitieux. “Passionnés et passionnants” comme le rappelait, non sans une pointe d’émotion, notre 1er Président, Didier Maillet, au cours d’une interview en 2020.
« L’homme le plus simple animé par la passion, persuade mieux que le plus éloquent qui n’en a point ».
A cette première question, la majorité des spécialistes d’aujourd’hui vous répondra que la question ne se pose pas en ces termes car le changement n’est que l’évolution logique et inéluctable d’un marché qui vit au rythme du progrès, de la recherche et de la volonté de concevoir un espace public en perpétuelle transformation et de plus en plus vertueux.
Certains professionnels, plus puristes et conservateurs, se montrent moins réceptifs au progrès. Sans être rigoristes, ces derniers appartiennent à une génération qui a salutairement contribué à la conservation du savoir-faire ancestral du pavage ancien, et entendent bien continuer à défendre les vertus de ces techniques anciennes qui résistent si bien à l’épreuve du temps.
Alors accueillons avec bienveillance toute la pluralité des acteurs de la profession, garantissons la préservation de toutes les techniques et les savoir-faire, et soyons réceptifs au progrès, aux avancées intéressantes issues de l’innovation de la communauté technique et de l’industrie, particulièrement en termes de produits et d’architecture. A la grande satisfaction des concepteurs, toujours séduits par la diversité des choix architecturaux qui s’offrent à eux.
Étant entendu que la démarche qui consiste à expérimenter de nouveaux programmes de recherche et d’innovation, dans des domaines d’emploi ciblés, doit susciter une forme de prudence et de partage du risque expérimental par l’ensemble des acteurs et intervenants (industriels, maîtrises d’ouvrage, maîtrises d’œuvre et entreprises).
Toujours dans cette évolution des techniques et des produits, il convient à notre époque de distinguer le “Pavage Ancien” du “Pavage Contemporain ou Moderne”. Les distinguer ne veut dire les opposer, car ils ont, l’un comme l’autre, toute leur place dans l’espace public de demain.
Jadis, le pavage a été́ imaginé et exécuté pour assurer à lui seul les fonctions circulatoire et structurelle. Autrement dit, il devait résister aux sollicitations verticales et horizontales engendrées par la circulation, tout en minimisant les transferts de charge sur un sol support peu ou pas dimensionné. Ce qui explique que le fonctionnement du pavage traditionnel puisse être assimilé à celui d’un bâtiment ou d’un ouvrage en pierre.
Les efforts exercés par le trafic se reportent de modules en modules, grâce à l’effet de voûte dans le plan vertical, et à la présence d’appareillages courbes ou à joints croisés dans le plan horizontal. La combinaison de ces deux notions est essentielle pour garantir la stabilité de l’ensemble. En effet, une disposition de pavés qui ne permettrait de transmettre que les efforts verticaux ou horizontaux serait vouée à une ruine prématurée. Cela explique l’intérêt de l’imbrication des pavés entre eux et l’importance capitale des blocages de rives, qui participent directement à la reprise de ces efforts.
Ce Pavage Ancien étant essentiellement réservé aux chaussées et étant le fruit d’un triptyque indissociable regroupant le pavé, historiquement taillé à la main, ou clivé, l’appareillage, le plus souvent en arcs, et une architecture de pose en forme de voûte, le tout posé sur un empierrement plus ou moins élaboré selon les voies concernées. Un système souple qui a fait ses preuves, mais qui doit absolument faire l’objet d’une étude de conception aboutie, tant au niveau de la conception structurelle que de la conception géométrique.
Un gage de durabilité pour ces ouvrages qui résistent à l’épreuve du temps si le concepteur/prescripteur retient toutes les données d’un trafic qui se veut toujours plus dense, la géométrie limitée des pavés qu’offre aujourd’hui la filière de la transformation de la pierre, et les recommandations techniques en matière de drainage, de blocage, et de jointoiement.
Il s’agit là d’une technique éprouvée dont l’APP s’évertue, depuis sa création, à en conserver le savoir-faire ancestral.
Le pavage contemporain, quant à lui, associe une structure porteuse pré-calculée, un pavé, produit mécaniquement, généralement scié en surface et traité anti-glissement par flammage, bouchardage ou grenaillage et un appareillage aux qualités avant tout esthétiques. La standardisation de la fabrication automatisée des pavés, si elle apporte rendement et rigueur de fabrication, restreint paradoxalement les possibilités de forme que présentaient et permettaient les pavés taillés à la main.
Ces produits modulaires sciés, de type dalles ou pavés, calibrés et susceptibles d’être fournis en grande quantité ont permis d’envisager de traiter les zones piétonnes dans des délais raisonnables avec un maximum de confort pour les usagers.
Depuis de nombreuses années, les entreprises de pose membres de l’APP participent directement à cette nouvelle dynamique, adaptant leurs savoir-faire pour proposer des techniques et des agencements, et répondre aux demandes. Ce sont des projets très qualitatifs présentant généralement d’intéressants mélanges de matériaux, ainsi que des assemblages et des calepinages très variés.
D’une façon générale, la mise en œuvre de ce type de réalisations prévues pour des espaces, à priori destinés aux seuls piétons, se fait le plus souvent sur assise rigide en béton, associée à un mode de pose rigide de type mortier de ciment, avec un lit de pose de type mortier ferme humide dosé à environ 250 kg de ciment par m3 et des joints au mortier plus liquides, dosés à environ 400 kg/m3.
Dans ce nouvel élan architectural des espaces urbains, les concepteurs ont aussi souhaité traiter les chaussées classiques et les places de manière identique aux zones piétonnes, de façon à les associer en continuité dans une même silhouette graphique. On aborde alors, à ce stade, un sujet techniquement plus délicat, car les produits modulaires utilisés en zones piétonnes, de par leurs calibres et leurs modes de pose, ne sont généralement pas adaptés aux circulations que l’on connaît aujourd’hui dans les centres-villes, surtout dès lors que l’on est en présence de passage de bus. Quelques mises en œuvre un peu trop rapides et mal conçues ont pu rapidement démontrer les limites de l’exercice.
Forts de ces expériences, on a donc tendance, aujourd’hui, à préconiser et à
privilégier ce type de pavage et dallage moderne pour les domaines piétonniers, tout en recherchant une complémentarité esthétique pour les chaussées avec des techniques spécifiquement adaptées. En chaussée, il est en effet préférable de poser ces revêtements avec des techniques dites souples, mieux adaptées aux sollicitations du trafic, plus résistantes, et surtout durables.
L’entreprise spécialisée dans ce type de revêtement, dans son rôle de sachant, aura pour challenge de puiser dans son savoir-faire et ses références, afin de proposer des solutions alliant esthétique et durabilité, puis d’en convaincre le concepteur et, au besoin, le maître d’ouvrage.
Les préconisations proposées par les professionnels du pavage participent à cette recherche qualitative à la fois technique et artistique.
Le pavage restera une affaire de professionnels qui ne cesseront de puiser dans leurs connaissances, leur savoir-faire, et leurs retours d’expériences… Afin que ce beau métier d’art continue à sublimer l’Espace Public.
Nous pouvons affirmer aujourd’hui que le pavage est né en France au début du 13ème siècle, sous Philippe Auguste. Il n’était pas question à cette époque d’embellir les grands axes de la ville de Paris (Croisée de Paris), il convenait seulement de lutter contre l’insalubrité, les odeurs pestilentielles et les épidémies qui en résultaient. Et de canaliser dans des rigoles toutes les eaux de pluie, eaux usées et immondices. A chaque époque ses préoccupations et ses urgences !
Et nous entrons dans ce 21ème siècle avec des préoccupations aussi marquées que consensuelles, dont se sont emparés la société civile, la classe politique et les acteurs économiques : lutter contre le réchauffement climatique en préservant l’environnement et les ressources naturelles, et améliorer les conditions de travail dans nos sociétés modernes, entre autres.
Dans le cadre des marchés d’aménagement, le choix des produits et de leur provenance revient, dans la majorité des cas, au concepteur. Dès lors, il a fallu que les entreprises travaillent sur tous les autres leviers inhérents à leur propre organisation et à leur politique d’achat et d’investissement.
Ainsi, nombreuses sont les entreprises qui ont réorganisé leurs équipes terrain afin de réduire autant que possible les trajets, ou celles qui investissent massivement dans du matériel électrique, ou encore celles qui privilégient l’emploi au quotidien de produits biosourcés. Sans compter le recyclage des pavés – en vue de leur réemploi – qui est pratiqué par de nombreuses entreprises de l’APP. Et l’une d’entre elles n’a pas hésité à investir en recherche et développement, en collaboration avec un partenaire de la branche, pour la fabrication de pavés à base de déchets ultimes recyclés et neutralisés. Brevet qui a reçu un ACV positif montrant un impact carbone bien plus faible que celui d’un pavé identique en pierre naturelle pleine masse. Proposer aujourd’hui un pavé décarboné à base de déchets ultimes, c’est offrir un débouché pour des déchets qui sont actuellement enfouis ou incinérés. On pourrait également citer de nombreuses autres démarches individuelles, comme la construction d’un siège social à haute qualité environnementale réalisée par l’un de nos membres, ou encore l’achat par un autre adhérent des toutes premières machines de traitement mécanique des sols à l’hydrogène.
Par ailleurs, il est un autre domaine dans lequel les entreprises spécialisées doivent continuer à jouer un rôle majeur, celui de la mise au point des techniques de pavages drainants pour lutter contre les îlots de chaleur. Si l’APP a milité avec succès pour qu’un chapitre entier soit consacré au pavage drainant ou perméable dans la dernière édition du livre « Pierres Naturelles – Conception et Réalisation de Voiries et d’Espaces Publics », il reste un gros travail à accomplir pour convaincre les maitrises d’ouvrage et/ou maitrises d’œuvre les plus frileuses.
Les entreprises spécialisées sont conscientes que cela passera par une parfaite maitrise de ces techniques innovantes, condition sine qua non pour que le pavage drainant occupe une place de choix dans un espace public toujours plus sollicité et contraint.
Autant d’initiatives et de démarches individuelles ou collectives qui sont à saluer et qui légitiment la forte implication des entreprises de pavage en matière d’environnement.
De ce point de vue, on peut affirmer que notre métier a résolument changé, il s’est modernisé en s’adaptant aux nouvelles inspirations et règlementations. Aussi, il était primordial de se débarrasser du cliché caricatural du paveur cassant et taillant des cailloux, un peu comme le faisaient les prisonniers au bagne à une époque où les travaux forcés étaient encore de rigueur.
Toujours dans cette quête de promotion du métier de paveur et de modernisation de la filière, les professionnels ont pris conscience qu’il fallait trouver des solutions pour éradiquer le port de charges lourdes en mécanisant autant que possible les tâches quotidiennes des paveurs. Attirer de jeunes talents dans les entreprises passe par cette prise de conscience, et nécessairement par le traitement de la pénibilité, comme s’évertuent à le faire toutes les autres spécialités des travaux publics concernées.
Forts de ce constat, les adhérents de l’APP ont intégré dans leurs modes opératoires la mécanisation de toutes les tâches qui peuvent l’être aujourd’hui.
Aussi, en collaboration avec les industriels du secteur, certaines entreprises participent à la conception d’engins de levage ergonomiques et mieux adaptés. Et toutes les entreprises de l’APP, sans exception, ont fait l’acquisition de matériels, d’outils et d’équipements pour soulager leurs salariés et lutter efficacement contre les pathologies récurrentes auxquelles leurs paveurs sont quotidiennement exposés (mal de dos, troubles musculosquelettiques..).
Parmi les actions préventives ciblées par les entreprises adhérentes, on citera la participation aux campagnes nationales TMS PRO et à celle portée par la FNTP sur le risque d’exposition à la silice cristalline.
L’APP continuera à soutenir ces actions avec un seul objectif, prévenir les risques et préserver la santé des professionnels du pavage.
“Une entreprise responsable est une entreprise qui non seulement respecte les obligations légales en matière de protection de l’environnement, diversité, santé et bien-être des collaborateurs, mais surtout qui va au-delà”